lundi 6 mars 2017

Partie 2 : Chapitre 4

            C’était une attaque. La panique s’était emparée de tout le monde, alors que Armadillo, un super-criminel qui pouvait faire pousser des plaques d’écailles, comme un tatou, sur son corps, s’amusait à dévaster un quartier. Il se roulait en boule et fonçait à toute allure, démolissant les voitures sur son passage, et détruisant les murs. Il poussait des cris hystériques et des rires de dément alors qu’il détruisait tout ce qu’il pouvait sur son passage.

            « Ce qui est cool avec ces super-vilains, c’est qu’ils ont toujours l’air de se marrer et de passer un bon moment ! s’exclama Cuistot qui observait de loin le manège d’Armadillo, attendant le signal convenu pour lui mettre le grappin dessus.
— C’est parce qu’il y a un vrai côté cathartique à tout péter. Je sais ce que je dis, j’étais un super-criminel, répondit Rocco.
— La récré est terminée, c’est le moment d’arrêter les frais. Vous serez prudents, les gars, OK ? S’il vous touche dessus en roulant, il va réduire vos os en farine. » déclara Atchoum-Man.
            Armadillo continuait son œuvre de dévastation quand soudain, il se mit à éternuer. Cela le déséquilibra, et il trébucha. Il se releva aussitôt et lançant ses regards partout, il sembla chercher quelque chose. Greg n’aimait pas trop ça : il avait l’impression d’être devenu trop célèbre depuis qu’il avait vaincu Kratos. Avant, quand il faisait éternuer ses adversaires, ils ne se méfiaient pas forcément, et de ce fait, la Ligue avait le temps de mettre en place une stratégie, le temps que la cible d’Atchoum-Man ne comprenne que ses éternuements n’étaient pas naturels. Mais là, dès qu’un super-criminel éternuait sur les lieux de son méfait, son premier réflexe était de se mettre aux aguets et de se préparer au combat.
            « La célébrité, ça fait perdre l’avantage tactique de la surprise… soupira Greg.
— T’inquiètes, je vais lui mettre un coup au moral pour le ralentir !» s’exclama Tear, prêt à passer à l’action.
            Cela fonctionna, pendant un court instant, Armadillo sembla être ailleurs, prêt à abandonner. C’était le moment pour la Ligue des Inutiles de passer à l’action et de…

            Mais alors, sous les yeux des Inutiles, Armadillo s’envola, et se mit à léviter au-dessus du sol, ce qui n’était pas du tout dans ses capacités, habituellement. Dans un flash rouge, Lumen apparut devant Atchoum-Man qui se figea.
            « Greg reste en dehors de ça ! On s’occupe du reste !
— Gaëlle ? C’est quoi ce merdier ? » s’exclama Atchoum-Man hors de lui. L’Egide venait de débarquer. Punch, l’adolescente toute-puissante, grimpa dans les bras du Géant qui avait atteint une taille de six mètres, et ce dernier la lança vers Armadillo. Celui-ci, comprenant ce qui se tramait, se concentra, faisant saillir ses écailles. Mais Punch avait du punch, et aussi dures que fussent ses écailles, cela n’empêcha par Armadillo de la sentir passer, l’attaque brutale.
            Il vrilla et s’écrasa contre un mur de béton. Il tenta de se relever, en titubant, puis s’apprêta à se rouler en boule de nouveau. Mais alors, Lumen se téléporta devant lui, et usant de son laser oculaire, elle dévia sa trajectoire. Armadillo roula vers le Géant, qui le ramassa et le fracassa au sol à plusieurs reprises, jusqu’à ce que le criminel perde connaissance. Tout s’était déroulé en un éclair, l’Egide venait de faire preuve une nouvelle fois de son efficacité.
            « Beau travail tout le monde, allez on ramène ce malpropre en prison, et si vous êtes sages, je vous offre des Paris-Brest ! s’écria Gravitas.
— Je préfère les mille-feuilles ! répliqua Punch.
— Je préfère les Paris-Brest, et si t’es pas contente, tu n’as qu’à t’acheter ton mille-feuilles toi-même, répliqua Gravitas.
— Vielle bique, crevarde, je te hais sale radine… marmonna pour elle-même l’adolescente.
— Tu as été extraordinaire Lumen, dommage que Terminacop et Singham n’aient pas pu être des nôtres. » continua la cheffe de l’équipe.
            Lumen acquiesça avec un sourire radieux, puis elle se tourna vers la Ligue des Inutiles. Ils semblaient tous être heureux de la voir, à l’exception d’Atchoum-Man qui tirait la tronche. Gaëlle décida d’aller discuter avec ses amis. Gravitas hocha la tête d’un air approbateur. Quand elle s’approcha de ses amis, Textil lui sauta au cou.
            « Hé, ça fait plaisir de te revoir Lumen ! s’exclama Claire.
— Salut les amis !
— Hé ben, c’était quelque chose ! Vous êtes super impressionnants ! s’exclama Arcimboldo en faisant la bise à son amie.
— C’est devenu une sorte de routine, répondit avec réserve Lumen.
— On gérait… maugréa Atchoum-Man qui rejeta Gaëlle alors qu’elle s’approchait de lui pour le saluer.
— Eh, tu ne me salues pas ?
— Je ne suis pas contre un bisou, moi ! s’exclama Rocco.
— Je ne sais même pas qui tu es, lui répondit simplement Lumen.
— On gérait cette affaire Lumen ! s’écria Atchoum-Man.
— Mais pourquoi tu t’énerves comme ça ? demanda Lumen qui était perplexe.
— Hé Greg, tu ne vas pas nous emmerder encore ? On a enfin l’occasion de revoir la petiote, tu ne vas pas foutre en l’air nos retrouvailles ? soupira Tear.
— Oh ! Pardon ! Non je ne voudrais pas foutre en l’air vos retrouvailles, tu as raison Gilles. Vraiment désolé Lumen, je ne voulais pas gâcher ta journée, merde je suis vraiment…un Inutile, hein ?
— Greg, qu’est-ce que tu racontes ?
— Est-ce que ça t’amuse de nous humilier ? C’est quoi cette nouvelle lubie de te la jouer super-héroïne modèle ? Oh attention les Inutiles, ne faites pas trop les malins avec vos pouvoirs de merde, vous n’êtes pas comme nous les VRAIS super-héros ! Hein ?
— Mais Greg, je ne… Lumen semblait plus perdue que jamais.
— Hé arrête ça Greg ! temporisa Cuistot.
— Lumen, t’as beau jouer les malignes avec tes nouveaux super-potes, que cela ne te dispense pas de te souvenir d’où tu viens !
— Mais qu’est-ce que je t’ai fait ?
— Tu nous traites comme…comme eux ! » explosa Greg en pointant du doigt les autres membres de l’Egide qui observaient en silence.
            Il y eut un long silence gêné. Greg, le regard furibond observait les yeux de Lumen, et il se rendit compte qu’elle avait l’air blessée. Il devina que son joli visage devait se décomposer sous son masque. Il en fut affligé, car il avait toujours eu beaucoup d’affection pour Lumen. Mais là, il aurait voulu l’étrangler. Il ne prêta pas attention aux protestations de ses amis, puis tournant le dos à tout le monde, il se contenta de cracher : « Je prends ma journée. Et toi Lumen, je préférerais ne plus te revoir. » puis, marchant d’un pas décidé, il s’éloigna, laissant-là une assistance médusée.

            Terminacop ne savait pas pourquoi on lui avait demandé de venir dans ce bâtiment qu’il connaissait très bien. C’était l’une des permanences discrètes des services secrets, il était souvent appelé ici quand on requérait son pouvoir dans un cadre moins super-héroïque. Avec un pouvoir comme le sien, et de telles compétences, on n’avait pas tardé à voir l’utilité de Terminacop pour les assassinats. Bien sûr, pour le bien commun se disait-on toujours pour se rassurer et se couvrir. Il y avait toujours des intérêts plus grands que les individus en eux-mêmes et qui donc, nécessitaient une balle dans la tête, plus expéditive que de longs pourparlers. Un tueur efficace, impossible à tracer… Terminacop était une aubaine pour les opérations en off.
            Terminacop pénétra dans le bureau et s’installa tranquillement sur la chaise, avec nonchalance, comme pour montrer qu’il avait la main dans toute négociation qui pourrait survenir. Trois hommes à l’air strict, engoncés dans des costumes sombres, vinrent se placer face à lui.
            « Messieurs, le moins qu’on puisse dire, c’est que vous avez le sens de la mise en scène et de la surprise. Je peux savoir, maintenant, pourquoi vous m’avez invité ?
— Terminacop nous avons besoin de vos services.
— Evidemment. Dites-moi, qui dois-je tuer ? demanda avec un sourire suffisant Terminacop.
— Vous devriez rester assis et bien vous accrocher. » déclara le plus âgé des hommes en se levant. Terminacop fut surpris par le ton de sa voix. Il lui sembla que quelque chose d’important s’était passé.
            « Ce que je vais vous dire est classé secret-défense. Le président lui-même l’ignore. Terminacop, l’heure est très grave.
— J’en ai bien l’impression, commenta le héros dont le ton chafouin, qu’il affichait plus tôt, s’était éteint.
— Il y a de cela deux jours, une émeute a eu lieu à la prison de haute sécurité du Val. Et il y a eu évasion. Vous n’ignorez certainement pas que cette prison est particulière, c’est celle qui abrite les super-criminels. Plus qu’un centre pénitencier, c’est surtout une sorte de poubelle dans laquelle on stocke ces ordures en attendant qu’ils crèvent.
— Oui, la réinsertion, ça n’a jamais été votre truc.
— On ne peut pas réinsérer des gens qui se prennent pour Dieu, mais d’un autre côté, les exécutions ne sont pas très populaires auprès du public. Toujours est-il que c’est dans cette prison qu’était écroué Gepetto le marionnettiste.
— Qu’est-ce que ça veut dire était écroué ? Terminacop avait sursauté, et si on avait pu voir sous son casque, on se serait rendu compte qu’il avait pâli.
— Ce que vous pensez. Il s’est échappé.
— Gepetto est en liberté ? Vous êtes en train de me dire que ce cinglé est quelque part dans la nature ?
— Oui. Nous essayons de garder l’information secrète, si cela venait à se savoir, alors on irait au-devant d’une vague de panique incontrôlable.
— On parle bien de Gepetto, le mec qui a annihilé les Wonder 13 ? Celui dont on a pu se débarrasser que parce que par miracle Kratos et Raijin ont jugé bon de ne pas se taper dessus pour l’attaquer lui ?
— Terminacop, nous nous tournons vers vous, car nous pensons que vous êtes aujourd’hui le seul à pouvoir l’éliminer.
— Moi ?
— Vous devez le retrouver et l’assassiner dans les plus brefs délais ! Il en va de la sécurité du monde.
— Attendez une minute. Ce que vous êtes en train de me demander, c’est d’aller retrouver le diable et de lui coller une balle en pleine tête ?
— Précisément.
— Vous êtes conscients que je ne suis absolument pas de taille face à lui ?
— On n’a pas d’autre choix que de nous en remettre à vous. Kratos et Raijin ont disparus, quant à l’Egide, pour tout vous dire, je ne vois pas vos camarades prêts à se lancer dans un assassinat. Or, on a besoin que Gepetto meure. » Terminacop tiqua. Lui et Gravitas avaient bien conspiré contre la Ligue des Inutiles, dans le passé. De toute évidence, ils étaient toujours idéalisés comme étant des parangons de vertu et d’héroïsme.
            « Terminacop, ce qu’on vous demande, c’est de prévenir une crise qui pourrait être catastrophique. Vous êtes le seul capable d’un tel exploit.
— Très bien. Très bien, j’ai compris. Je vais me mettre au travail.
— Une dernière chose, Terminacop ! Il est important que toute cette histoire reste secrète. Il faut agir vite et dans l’ombre. Le monde ne doit pas savoir que Gepetto est libre. »
            Terminacop acquiesça. Mais il ressentit un frisson parcourir son échine. Il avait peur.

Sans aucun lien,
Je me tiens bien.
Je ne titube, ni ne chancelle
Je n’ai besoin d’aucune main
Qui tire les ficelles.


            Gepetto chantonnait pour lui-même, dissimulé dans cette petite chambre de bonne située au centre de Paris. Son regard portait sur les rues, peuplées de ces fourmis qu’on appelle les parisiens. Il les regardait vivre, il les regardait s’agiter, il trouvait qu’elles formaient un sacré désordre. Il trépignait d’impatience, il avait vraiment envie d’aller leur montrer comment, par le contrôle, il pouvait créer un monde ordonné, propre. Oui…Propre…Mais il devait être patient. Son moment allait arriver, c’est pourquoi il ne faudrait surtout pas se précipiter.

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