lundi 10 avril 2017

Partie 2: Chapitre 8

Angelure ne savait pas pourquoi elle devait attaquer une épicerie, mais tout ce qui pourrait la libérer de l’emprise de Gepetto était bon à prendre. Elle fit son entrée dans les lieux et remarqua le regard concupiscent que lui avait lancé l’épicier. C’était un jeune homme qu’elle trouvait assez repoussant, avec son teint de cadavre, et cette moustache fine de pervers. Il lui lança un petit sourire et passa une langue scabreuse sur ses lèvres. Angelure répondit par un sourire éclatant. Elle allait prendre un grand plaisir à le tuer.
            Elle s’approcha du vendeur et posa nonchalamment les coudes sur le comptoir où se trouvait la caisse, regardant avec un air intense le vendeur droit dans les yeux.
            « Je peux faire quelque chose pour toi, bébé ? lui demanda-t-il d’une voix nasillarde.
— Oui. Est-ce que tu peux mourir pour moi, s’il te plaît ? » lui demanda-t-elle d’une voix mielleuse. L’expression de surprise de l’épicier resta figée sur son visage, alors que la criminelle, posant une main sur chaque joue, lui gela la tête. Il resta debout, tentant de marcher d’un pas titubant, et lançant ses mains dans toutes les directions. Pendant ce temps, Angelure alla vers l’étagère qui contenait les bouteilles de vin et en prit une. Elle la déboucha, en sentit le contenu et grimaça. Puis, elle lança d’un geste rapide et précis la bouteille dans la tête du vendeur.
            Un bruit brutal et cristallin se fit entendre. Le corps s’affala, et la tâche rouge qui était éclaboussée contre le mur mêlait sang et vin, dégoulinant mollement le long de la paroi comme des larmes écarlates. Elle était satisfaite, et se prépara à aller faire son rapport à Gepetto, quand elle aperçut une silhouette dont l’ombre se découpait à l’entrée. Cette silhouette, reconnaissable entre mille était celle de Terminacop.

            Il aurait dû intervenir plus tôt, se maudit-il. Elle avait déjà commis un carnage. Quand il avait fait son entrée dans la boutique, la tête du vendeur avait déjà éclaté comme une pastèque. Il leva le bras vers Angelure qui se tenait immobile et ses doigts se transformèrent en canons de mitrailleuse. Le réticule de visée installé dans son casque indiquait les points non vitaux qu’il pourrait toucher afin d’immobiliser Angelure, chaque cible était agrémentée d’un pourcentage qui indiquait les chances de survie d’Angelure en cas d’impact. Il avait besoin d’elle en vie s’il voulait espérer retrouver la trace de Gepetto.
            « Tu es venu jeter un froid, Robotor ? demanda Angelure dans un sourire malsain.
— C’est Terminacop. Tu vas me suivre et répondre à mes questions, et tu vas retourner gentiment en cellule.
— Je ne crois pas, Terminacop. Tu ne t’imagines pas ce qui va s’abattre sur le monde.
— Oh que si, j’imagine. Tu vas me dire où trouver Gepetto. »

            Angelure ouvrit de grands yeux étonnés. Ainsi il était au courant. Ce serait mauvais pour elle de se retrouver prise entre deux feux, si Terminacop et ses partenaires décidaient de s’attaquer à Gepetto. Elle avait accompli sa mission, à présent, elle n’aspirait qu’à faire son rapport à Gepetto avant de s’en aller. Et ce ne serait pas Terminacop qui se mettrait en travers de sa route. Alors pour réponse, elle tendit sa main vers lui, et de ses doigts jaillirent des grains de poussière de glace. Terminacop esquiva l’attaque en se jetant sur le côté. Le mur se couvrit de givre et la température chuta dramatiquement dans la boutique.
            Terminacop, qui s’était planqué derrière un présentoir, bondit et fit feu de tout bois. Mais Angelure matérialisa un mur de glace qui lui fit office de bouclier. Cachée derrière, elle fit apparaître dans sa main une lance de glace qu’elle lança en direction de Terminacop qui la fit éclater en transformant son avant-bras en canon. Le mur de glace qu’Angelure avait dressé pour la protéger vola aussi en éclats. Elle parvint à s’éloigner du danger en glissant au sol au moyen d’un tapis de glace qu’elle faisait apparaître sous ses pieds. Elle tenta de faire émerger une stalagmite sous les pieds de Terminacop qui l’évita au dernier moment, se prémunissant de tout risque d’empalement.

            Angelure profita de ce moment pour glisser jusqu’à la sortie, espérant s’échapper. Mais une détonation éclata, et un petit obus explosa un peu devant elle, donnant naissance à un nid de poule qu’elle ne put esquiver. Elle trébucha et tomba sur le bitume en roulant. Elle parvint pourtant rapidement à se remettre, et fit volte-face pour se retrouver face à Terminacop qui avançait sur elle, affichant un air implacable. Angelure lança des rafales gelées sur Terminacop qui les esquiva et courut vers elle. Il avait transformé son bras droit en fusil à pompe et tira une décharge de chevrotine qu’elle para avec un autre mur de glace. Mais, si elle avait échappé au tir, elle dut se couvrir les yeux pour éviter les particules de givre qui flottèrent dans les airs. C’est l’occasion que saisit Terminacop pour la frapper au visage avec son bras canon.
            Il pointa son canon sur elle alors qu’elle était au sol. Terminacop, sous son casque, affichait un sourire arrogant. Bien entendu qu’il n’allait pas perdre face à une criminelle du calibre d’Angelure. Il était bien trop puissant pour elle. C’était cependant regrettable qu’elle ait eu le temps de faire une victime.
            « Tu vas maintenant me dire où je peux trouver Gepetto, lui demanda-t-il, baissant tout de même la voix, bien que la rue fût déserte.
— Je ne suis pas sûre que tu aies réellement envie de le retrouver ! » ricana-t-elle dans un air de défi. Pour toute réponse, il tira une balle à deux centimètres de son oreille. Angelure ne put s’empêcher de sursauter en poussant un petit cri de surprise. Terminacop n’allait pas réitérer sa demande une fois de plus. Mais Angelure avait bien plus peur de ce que lui ferait Gepetto si elle le dénonçait. Terminacop ne pourrait pas l’abattre si elle restait au sol ainsi, ne serait-ce que pour des questions d’image, elle en était bien consciente.

            Terminacop s’était rendu compte du petiot manège d’Angelure, et il n’apprécia pas le fait que celle-ci puisse croire qu’elle pouvait se jouer de lui de la sorte. Il était vrai qu’il n’avait aucun intérêt à la tuer, surtout s’il voulait qu’elle parle, mais il pourrait probablement la torturer. Il songea à lui tirer une balle dans la main, après tout, son pouvoir venait de là… il pourrait toujours dire qu’elle avait eu un mouvement brusque…
            Il s’apprêta à tirer sur elle, le bras tendu, quand il se rendit compte qu’il avait du mal à bouger. Son cerveau avait beau ordonner à son bras de tirer, celui-ci refusait d’obéir. Et ce n’était pas que son bras, se rendit-il soudain compte. Son bras, ses jambes, même sa tête, rien ne bougeait, il paraissait être immobilisé. Angelure s’en rendit compte, et, un sourire diabolique aux lèvres, elle matérialisa un pic de glace dans sa main droite, toisant d’un air menaçant Terminacop.

            « Non, Angelure, je vais avoir besoin de notre ami ! » s’exclama une voix masculine qui prit Terminacop par surprise. Il y avait dans cette voix quelque chose d’effrayant, dans la façon avec laquelle celle-ci paraissait chaleureuse sans l’être réellement. Cette voix, c’était comme une lumière faite avec des ténèbres. Il y avait quelque chose de faux dans cette voix, ou plutôt dans le ton de celle-ci, qui faisait que les poils se hérissaient et qu’un sentiment de malaise s’installait. C’était la voix d’une personnalité diabolique qui tentait de feindre la gentillesse. Il ne pouvait pas bouger, mais il se doutait de l’identité du possesseur de cette voix. Ce n’est qu’à ce moment qu’il se rendit compte de ce qi avait causé son apparente paralysie, et cette idée lui fit froid dans le dos.
            « Terminacop, c’est un grand plaisir de te voir. Je ne pensais pas que tu serais le premier à tomber dans mes filets ! » sourit Gepetto. Terminacop força sur son corps, refusant de croire qu’il soit réellement sous l’emprise de Gepetto. Mais comme pour lui prouver que ce qu’il vivait est réel, Gepetto bougea les doigts comme un marionnettiste et le corps de Terminacop se mit à se mouvoir, en dépit de toute volonté. Le super-héros se mit alors à faire des gestes ridicules, et son corps prit des positions grotesques.
            « Tu voulais que je l’attire ici ? lui demanda Angelure.
— Lui ou un autre. Il me fallait un Super-Héros, alors je me disais que j’allais en attirer un en t’envoyant en mission. Je suis très fier du résultat.
— Très bien. Donc, je suis libre, c’est bien ça ? Tu m’avais dit que tu me laisserais partir si j’attaquais cette épicerie ! » déclara Angelure d’une voix mal assurée. Un éclair mauvais passa, l’espace d’un instant, dans le regard de Gepetto. Mais, aussitôt après, il reprit sa composition, et son sourire revint sur son visage.
            « Bien entendu, je n’ai pas oublié Angelure. Mais, avant, il y a juste une toute dernière chose que j’aimerais que tu fasses pour moi !
— Une… une dernière chose ? Angelure n’aimait pas trop la tournure qu’avait pris la conversation. Elle se demanda si Gepetto avait réellement l’intention de la libérer de son emprise.

— Une toute dernière. Promis, après ça, tu n’auras plus jamais affaire à moi. » elle acquiesça cependant, peu rassurée. Terminacop, entre rage et désespoir, avait gardé le silence. Il était entièrement à la merci du pire psychopathe de tous les temps. Il pouvait tout aussi bien se considérer comme mort. Il suffisait simplement que Gepetto le décide. Ses pieds s’activèrent sans son accord, et son corps suivit le vieil homme, faisant fi de sa propre volonté.

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